Sarabande, le dernier film de Bergman
Ingmar Bergman réalise Sarabande à 86 ans alors qu’il pensait en avoir fini avec le cinéma. La disparition prématurée de sa dernière épouse, Ingrid Von Rosen, provoque en lui un tel chaos, qu’un nouveau tournage s’impose. En fait, l’événement relance pour lui des questions existentielles qu’il pensait avoir réglé, notamment en faisant le Septième Sceau (1957). A l’issue de ce film, le metteur en scène suédois affirmait que la question de l’au-delà était résolue pour lui : il n’y a rien. Et sa réponse était catégorique. Pourtant, dans ses films, nombre de revenants viennent s’entretenir avec les vivants. Dans Sarabande, le fantôme prend la forme d’un portrait photographique. Ainsi place-t-il au coeur du film le portait d’une défunte : paradoxalement, cette image fixe va mettre en mouvement les personnages plongés dans une inertie et provoquer leur déplacement. La Sarabande n’est-elle pas d’abord une danse ?
Isabelle Rèbre est réalisatrice, chercheuse et écrivaine. Elle a réalisé plusieurs moyens-métrages dans lesquels elle interroge l’acte de création. Son premier long-métrage Pollock&Pollock est sorti en salle en 2023. Depuis une dizaine d’années, elle mène une recherche autour du photographique dans son lien à la mémoire et au deuil. Elle a publié un essai « La dernière photographie. Sarabande de Ingmar Bergman » La lettre volée (2017) dans lequel elle met au jour une puissance performative des images. Dans un ouvrage à paraître en 2025, elle s’intéresse à des films-essais de Naomi Kawase, Alain Cavalier et David Perlov qui ont valeur de rituels dans des processus de deuil.